Le coût de base rajusté en assurance

Par Mathieu Huot | 3 décembre 2020 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Femme entourant une famille miniature avec ses mains en guise de protection.
Photo : Jirsak / iStock

Il est de plus en plus commun de rencontrer un client ou prospect qui possède une société de gestion ou une société en exploitation pour son entreprise. Cette situation ouvre la porte à un éventail de possibilités et de stratégies fiscales selon la situation de la personne.

D’un point de vue assurance vie, il est fréquent de recommander que le contrat d’assurance vie soit pris à l’intérieur de sa société. Un des principaux arguments est le paiement de la prime avec des sommes provenant de la société et non de sa poche personnelle.

À titre d’exemple, pour une prime annuelle de 10 000 $, voici quel serait le revenu gagné nécessaire pour obtenir la liquidité après impôt pour s’acquitter de la prime :

Comme vous pouvez le constater, il faut plus de 21 400 $ de revenus personnels pour obtenir la somme nette d’impôt de 10 000 $. Du côté société, un revenu brut de 11 627 $ seulement est nécessaire pour obtenir ladite somme.

ASSURANCE SOUSCRITE PERSONNELLEMENT OU PAR LA SOCIÉTÉ

La question que le client risque de se poser est : cela change-t-il quelque chose que l’assurance soit prise dans la société plutôt qu’à son nom personnel?

Lorsque l’assurance est souscrite personnellement, l’assureur verse au décès de l’assuré la prestation à ses héritiers qu’il avait nommés bénéficiaires au contrat, et ce, sans qu’il y ait d’impôt à payer.

Toutefois, lorsque l’assurance est souscrite par la société, la société en devient aussi le bénéficiaire. C’est donc celle-ci qui recevra la prestation d’assurance lors du décès de l’assuré. Si nous voulons que nos héritiers profitent de ces sommes, ceux-ci devront sortir les sommes par l’entremise du compte de dividende en capital (CDC).

Mais est-ce que la prestation totale d’assurance peut être versée par l’entremise du CDC? Le CDC se compose du capital-décès moins le coût de base rajusté (CBR) de la police au moment du décès. C’est donc dire que le capital-décès n’est pas entièrement libre d’impôt selon le CBR du contrat. Comment évolue donc le CBR d’une police d’assurance?

Nous avons élaboré différents scénarios à partir des informations suivantes :

Émilie, 40 ans, souhaite souscrire une police d’assurance vie. Elle peut se permettre une prime annuelle de 10 000 $ payable pendant 10 ans.

Nous avons analysé une assurance vie universelle temporaire renouvelable annuellement (TRA) avec un capital-décès uniforme incluant un taux de rendement de 1,5 %.

Nous avons aussi analysé une assurance vie entière avec participation. Pour l’exercice, nous avons considéré le barème actuel moins 1 %.

Comme on peut le remarquer, le CBR atteint son sommet dans les deux situations autour de la 9e année. Toutefois, la police vie entière avec participation prend près de 11 ans de plus que l’assurance vie universelle pour atteindre 0. En résumé, le capital-décès ne pourra être entièrement versé libre d’impôt avant l’âge de 73 ans pour l’assurance vie universelle en TRA et 84 ans pour l’assurance vie entière avec participation.

Quelle serait la situation si Émilie avait plutôt 60 ans?

Dans le cas de l’assurance vie universelle TRA, le CBR tombe à 0 à l’âge de 93 ans. Dans le cas de l’assurance vie entière avec participation, le CBR est toujours positif à l’âge de 95 ans.

Considérant que le CBR a une importance dans un contexte d’entreprise, il serait important d’en comprendre sa nature. Le CBR est augmenté de la somme des primes payées annuellement et est diminué du coût annuel de l’assurance pure (CNAP). Durant les premières années d’un contrat d’assurance, la prime annuelle est largement supérieure au CNAP, faisant donc augmenter le CBR. Toutefois, puisque la prime reste fixe, mais que le CNAP augmente annuellement, celui-ci excédera le montant de la prime et à ce moment le CBR aura tendance à redescendre et tendre vers le zéro. Le CBR ne peut être négatif.

Il est faux de croire que l’assurance vie universelle en TRA est systématiquement plus intéressante que l’assurance vie entière compte tenu du fait que le CBR tend plus rapidement vers le zéro. D’autres facteurs peuvent influencer la pertinence d’un produit d’assurance par rapport à un autre.

Toutefois, il est important de présenter l’évolution du CBR au client afin de s’assurer qu’il ait bien compris la possibilité que le capital-décès puisse ne pas être entièrement versé aux héritiers libre d’impôt.

Mathieu Huot, M.Fisc., Pl. Fin., CIM, est fiscaliste, planificateur financier et gestionnaire de portefeuille agréé à IG Gestion de patrimoine.

Mathieu Huot