L’assurance : Un secteur en transition

Par Michelle ­Schriver | 28 mai 2024 | Dernière mise à jour le 27 mai 2024
5 minutes de lecture
Famille sous un parapluie rouge
Photo : Jirsak / iStock

Plusieurs questions en jeu dans le secteur de l’assurance ont des implications pour les conseillers en assurance et les clients, notamment le vieillissement de la population, l’évolution des conseils et la surveillance accrue des agences générales (AG).

« Plus personne ne recrute [de jeunes conseillers en assurance] », constate Melissa Harrell, directrice de McRae Wealth Management à Winnipeg. Les institutions s’efforcent d’attirer les conseillers en milieu de carrière. « C’est aux conseillers indépendants de recruter de nouveaux agents », affirme-t-elle.

Melissa Harrell a embauché des étudiants universitaires pour des emplois d’été, notamment pour mettre à jour le système de gestion des relations avec les clients de l’entreprise. Quelques étudiants ont fini par rester dans le secteur, rapporte-t-elle.

De l’autre côté de l’équation, il y a le manque de planification de la succession, ce qui signifie que le service à la clientèle pourrait se dégrader considérablement lorsqu’un conseiller prend sa retraite ou décède.

« La qualité de service que les gens exigent aujourd’hui n’est plus celle des ventes transactionnelles d’assurance-vie, où l’on vend une police d’assurance temporaire de dix ans et où l’on prend contact avec les clients après neuf ans », selon Melissa Harrell. Maintenant, il s’agit plutôt d’une conversation permanente sur le thème : « Comment cette assurance-vie, cette assurance-invalidité ou cette assurance contre les maladies graves s’intègrent-elles dans mon plan d’ensemble ? »

L’Independent Financial Brokers of Canada (IFB) a plaidé pour que les autorités de réglementation émettent des directives concernant la planification de la succession. Selon Susan Allemang, directrice des politiques et des affaires réglementaires de l’IFB à Mississauga (Ontario), les conseillers et les AG devraient avoir des plans de succession. « Cela fait partie du traitement équitable des clients, déclare-t-elle. Les clients doivent être pris en charge tout au long du cycle de l’entreprise ou de la police. »

Après plus de deux décennies passées à vendre des assurances et des investissements, Ken Doll, directeur de Wealth Architects à Calgary, a commencé à se concentrer sur la planification il y a six ans afin de mieux répondre aux besoins des clients. (Ken Doll, qui représente les conseillers en assurance auprès de l’Alberta Insurance Council, s’est adressé à Investment Executive en tant que conseiller.)

Il a fait remarquer que le départ à la retraite des baby-boomers a stimulé la demande de planification et que les conseillers qui possèdent une expertise en la matière peuvent se différencier.

La planification est « axée sur le client [et] constitue une valeur ajoutée pour les conseillers qui cherchent à se démarquer, et je pense qu’elle est sur le point de se concrétiser », analyse Ken Doll, évoquant la possibilité que les informations liées à la planification fassent de plus en plus partie des exigences en matière de connaissance du client dans le domaine des investissements.

Ken Doll s’attend à ce que le conseil évolue encore, les conseillers continuant à rechercher des relations avec des professionnels dans des domaines tels que la comptabilité et le droit. « Nous verrons des services supplémentaires s’ajouter », prédit-il.

Une approche d’équipe est souvent nécessaire pour bien servir les clients, complète Melissa Harrell. Les conseillers indépendants s’associent pour créer des mini-bureaux, remarque-t-elle, ou un planificateur financier peut rechercher un spécialiste de l’assurance. Elle sous-traite la gestion de portefeuille. « Nous ne pouvons pas tout faire », explique-t-elle.

Pourtant, Melissa Harrell préfère garder le contrôle de son entreprise. Une fois que l’on devient indépendant, « on ne revient pas en arrière », assure-t-elle. « Il y a tellement de flexibilité pour opérer comme on l’entend ».

Mais il y a aussi « beaucoup d’obligations de rendre compte et de responsabilités pour s’assurer que l’on opère de manière appropriée », tempère-t-elle.

« Vous devez être votre propre technicien, faire votre propre marketing [et] respecter les règles — et quelque part, vous devez faire des affaires et essayer de gagner un peu d’argent », dit Ken Doll énumérant ainsi quelques défis auxquels sont confrontés les conseillers indépendants.

Melissa Harrell affirme recevoir le soutien d’autres conseillers, qu’elle rencontre pour discuter du cryptage des courriels, par exemple, ou pour savoir s’ils utilisent un certain AG.

« Le réseau des conseillers en services financiers indépendants est plus fort lorsque nous nous parlons », soutient-elle.

CHANGEMENT DE RÉGLEMENTATION

L’Ontario prévoit d’améliorer la conduite et le traitement des clients à la suite d’examens de surveillance qui ont révélé une série de faiblesses, notamment des lacunes dans les rôles et les responsabilités partagés entre les assureurs, les AG et les conseillers en assurance.

Dans le courant de l’année, la province mènera une consultation sur une nouvelle règle pour les AG. Cette consultation intervient dans un contexte de consolidation du secteur.

Certains AG « deviennent des organisations assez grandes et complexes », remarque Susan Allemang. Si certaines parties prenantes craignent que l’industrie ne s’oriente vers un modèle de concessionnaire, elle n’est pas convaincue que ce soit la tendance, bien qu’il s’agisse « d’une chose à surveiller ».

Une tendance qui a définitivement émergé est celle des exigences de licence pour les AG afin qu’elles aient des obligations de reporting. « Une partie de ces obligations est liée à la surveillance ou au respect des contrats avec les assureurs », explique Susan Allemang.

Les assureurs et les AG « reconsidèrent leurs rôles [de surveillance] parce que les régulateurs exercent une pression beaucoup plus forte sur eux », rapporte Susan Allemang. L’harmonisation des réglementations est nécessaire, assure-t-elle, afin d’éviter les approches fragmentaires de la surveillance des conseillers en assurance et des AG.

Selon Melissa Harrell, les clients ont besoin de conseillers « sophistiqués » pour des produits complexes tels que l’assurance-vie permanente. Ces produits devraient être vendus par des conseillers agréés et titulaires d’une licence, estime-t-elle.

« Les clients n’ont pas besoin d’une assurance-vie universelle complexe lorsqu’ils ont des revenus faibles », rappelle Ken Doll.

Il suggère plusieurs domaines dans lesquels la réglementation pourrait être améliorée, notamment le marketing multi-niveaux, la vente de produits inadaptés, ce qui indique un manque de formation, et les modèles de rémunération tels que les commissions initiales, qui, selon lui, peuvent se traduire par un service moins continu.

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Michelle ­Schriver

Michelle Schriver est rédactrice en chef de Advisor.ca. Elle travaille avec l’a rédaction depuis 2015 et a été reconnue par les Prix du magazine canadien et la SABEW pour ses reportages. Envoyez-lui un e-mail à michelle@newcom.ca.