Le rôle incompris de la dette privée
OPINION — Mettre en lumière ses avantages méconnus.
Par Arif N. Bhalwani |13 mai 2024
4 minutes de lecture
Dans les chroniques précédentes, les auteurs analysaient le transfert de l’entreprise du particulier. La présente chronique proposera des pistes de solution afin de planifier et d’assurer la retraite de l’entrepreneur à la suite de cette transaction.
Aussi, l’accent sera mis sur les caractéristiques propres à la retraite d’un entrepreneur soit, habituellement, l’absence de régime de retraite (à l’exception des RRI) et un capital non enregistré fréquemment supérieur au capital enregistré. Les options habituelles de décaissement, notamment celles découlant du REER, ne seront pas couvertes ici.
OPTIMISATION DES REER AU MOMENT DE LA TRANSACTION
Comme le mentionnait Michel Lavoie dans la chronique ConseillerPME d’octobre, si le particulier vendeur était aussi un employé de la société vendue, il pourrait recevoir une allocation de retraite en reconnaissance de ses états de service. Le cas échéant, une portion de l’allocation de retraite peut être transférée au REER[2] et une portion possiblement importante sera fort probablement imposable, surtout si on a maximisé le financement du RRI juste avant le transfert. D’autre part, dans la mesure où les retraits subséquents survenaient avant les 65 ans d’âge du rentier, ce dernier perdrait la possibilité de fractionner ces retraits avec son conjoint.
Tout comme pour le REER, il sera possible d’utiliser le capital du RRI et de faire l’acquisition d’une rente viagère. Sous cette option, les règles de transfert maximum évoquées précédemment ne s’appliquent pas et on éviterait ainsi l’impôt de l’option précédente. Sans faire la promotion ou le procès de ce produit par ailleurs fréquemment pertinent, cette option se traduira évidemment, pour l’entrepreneur vendeur, par une perte de contrôle sur des sommes possiblement importantes. Est-ce que le particulier au profil entrepreneur favorisera cette option ? On notera enfin que les prestations de retraite d‘une rente souscrite directement d’un RRI, peu importe l’âge du rentier, pourront faire l’objet de fractionnement avec le conjoint.
Cette troisième option implique le maintien du régime et le paiement des prestations selon le design dudit régime. Ce faisant, le particulier conserve le contrôle des actifs et ne risque pas de voir une portion importante du capital soumis à l’imposition immédiate. Il devra toutefois maintenir le régime en vigueur avec les frais que cela comporte. Enfin, les prestations de retraite reçues directement d‘un RRI, peu importe l’âge du rentier, pourront faire l’objet de fractionnement avec le conjoint.
En conclusion, il existe donc trois options. Mais la plus prisée (le transfert au REER) est possiblement la moins fiscalement avantageuse. Il sera intéressant de questionner l’entrepreneur vendeur à savoir s’il est conscient des restrictions de décaissement du RRI.
LE RÉGIME DE RETRAITE INDIVIDUEL EN SITUATION DE VENTE D’ENTREPRISE
Dans la mesure où l’on choisira le maintien du RRI et le paiement d’une prestation à même celui-ci, la vente de l’entreprise changera forcément la donne. Est-ce que l’acquéreur voudra continuer à prendre le risque d’investissement et de survie que constitue le maintien d’un régime de retraite à prestations déterminées même pour un seul participant ? Si la réponse est non, ce qui est par ailleurs très probable, l’entrepreneur vendeur pourrait transférer le RRI dans une compagnie de gestion et conserver celui-ci en vigueur aussi longtemps qu’il le voudra. On notera toutefois que certaines règles devront être respectées pour que ce transfert soit possible.
SE CONSTITUER UN REVENU DE RETRAITE AVEC DES ACTIFS NON ENREGISTRÉS
Une fois la vente effectuée, il est probable que l’entrepreneur vendeur dispose d’actifs non enregistrés importants. Dans ce contexte, comment se constituer un revenu de retraite fiscalement efficace ? Voici trois des options à envisager :
Un peu comme dans le cas du RRI évoqué précédemment, est-ce que le particulier au profil entrepreneur favorisera cette option ? Dans l’affirmative, le traitement fiscal de cet outil en fera possiblement un choix intéressant. Il s’agit essentiellement d’une rente (viagère ou certaine) pour laquelle la portion intérêts est répartie également année après année. En effet, dans une situation de décaissement, le capital non enregistré qui s’épuise au fil des ans s’accompagne, toutes choses étant égales par ailleurs, d’une facture fiscale qui diminue aussi au cours des années. La résultante, un fardeau fiscal qui diminue au fil des ans, implique des revenus nets initiaux plus faibles. La rente prescrite permet au contraire de toucher un revenu net stable au fil des ans et apporte au rentier une sécurité du revenu. Mais il y a quand même une perte du contrôle du capital.
Aussi appelée rente « back-to-back », cette combinaison de rente viagère prescrite et d’assurance vie permet de reproduire les caractéristiques d’une obligation ou d’un dépôt garanti tout en bonifiant le rendement hors REER de ces produits de placement. Une portion de la rente après impôts servira à payer la prime d’une assurance vie qui reconstituera le capital au moment du décès. Il faut toutefois comprendre que cette stratégie, quoique possiblement pertinente, ne pourra par la suite être brisée en raison de la portion rente viagère. Le souscripteur devra aussi être assurable pour la portion assurance vie de la stratégie, ce qui pourrait ne pas être le cas. On notera également que la couverture d’assurance pourrait, éventuellement, être réduite si les objectifs du particulier devaient changer en cours de route.
Finalement, les taux prescrits de l’Agence du revenu du Canada (ARC) historiquement bas (présentement 1 %) permettent des prêts fiscalement avantageux au conjoint. Dans la mesure où un prêt est effectué au moins au taux prescrit, les règles d’attribution entre conjoints ne s’appliquent pas. Des règles spécifiques doivent être respectées, mais si le conjoint de l’entrepreneur vendeur a un taux d’imposition marginal plus faible que ce dernier, voici une façon d’améliorer l’efficacité fiscale des placements du couple. Il s’agit d’effectuer un prêt au conjoint – ces sommes étant ensuite investies par ce conjoint. Cette stratégie permettra aussi possiblement au conjoint d’utiliser des pertes en capital non utilisées. Les gains en capital générés par les placements provenant du prêt viendront éventuellement éponger ces pertes. Parmi les règles à respecter, mentionnons notamment :
Quoique cette dernière stratégie ne constitue pas une option de décaissement comme telle, elle constitue une façon d’optimiser les placements non enregistrés du couple, ce qui ne manquera pas de bonifier les revenus de retraite.
La préparation de la retraite d’un entrepreneur vendeur s’avère fréquemment plus complexe que celle d’un autre particulier. Notamment, le caractère spécifique de ces particuliers va souvent teinter les recommandations et l’écoute de celles-ci.
Deux questions à poser lorsqu’un client entrepreneur prend sa retraite :
1 Y a-t-il des mécanismes prévus pour garantir la longévité de toute proportion déterminée de capital à décaisser pour financer le coût de vie à la retraite ?
2 A-t-on une stratégie de préservation de capital advenant une détérioration de la santé et, ultimement, une perte d’autonomie ?
Jean-Guy Grenier, BAA, CMC, Adm.A., Pl. Fin., directeur régional – Elite, Développement et Mise en marché, Assurance et Épargne pour les particuliers, Desjardins Sécurité financière, Montréal.
Martin Dupras, A.S.A., Pl.Fin., D.Fisc., ConFor financiers inc.
• Ce texte est paru dans l’édition de décembre 2012 de Conseiller. Il est aussi disponible en format PDF.
Vous pouvez également consulter l’ensemble du numéro sur notre site Web.
[1] Le transfert admissible est égal à 2000 $ par année de service avant 1996 plus 100 $ par année de service avant 1989 (dans la mesure où aucune cotisation à un régime de retraite n’est acquise durant ces années). [2] Règles de transfert maximum entre un régime de pension agréé et un régime enregistré personnel (RIR 8517).
Dans les chroniques précédentes, les auteurs analysaient le transfert de l’entreprise du particulier. La présente chronique proposera des pistes de solution afin de planifier et d’assurer la retraite de l’entrepreneur à la suite de cette transaction.
Aussi, l’accent sera mis sur les caractéristiques propres à la retraite d’un entrepreneur soit, habituellement, l’absence de régime de retraite (à l’exception des RRI) et un capital non enregistré fréquemment supérieur au capital enregistré. Les options habituelles de décaissement, notamment celles découlant du REER, ne seront pas couvertes ici.
OPTIMISATION DES REER AU MOMENT DE LA TRANSACTION
Comme le mentionnait Michel Lavoie dans la chronique ConseillerPME d’octobre, si le particulier vendeur était aussi un employé de la société vendue, il pourrait recevoir une allocation de retraite en reconnaissance de ses états de service. Le cas échéant, une portion de l’allocation de retraite peut être transférée au REER[2] et une portion possiblement importante sera fort probablement imposable, surtout si on a maximisé le financement du RRI juste avant le transfert. D’autre part, dans la mesure où les retraits subséquents survenaient avant les 65 ans d’âge du rentier, ce dernier perdrait la possibilité de fractionner ces retraits avec son conjoint.
Tout comme pour le REER, il sera possible d’utiliser le capital du RRI et de faire l’acquisition d’une rente viagère. Sous cette option, les règles de transfert maximum évoquées précédemment ne s’appliquent pas et on éviterait ainsi l’impôt de l’option précédente. Sans faire la promotion ou le procès de ce produit par ailleurs fréquemment pertinent, cette option se traduira évidemment, pour l’entrepreneur vendeur, par une perte de contrôle sur des sommes possiblement importantes. Est-ce que le particulier au profil entrepreneur favorisera cette option ? On notera enfin que les prestations de retraite d‘une rente souscrite directement d’un RRI, peu importe l’âge du rentier, pourront faire l’objet de fractionnement avec le conjoint.
Cette troisième option implique le maintien du régime et le paiement des prestations selon le design dudit régime. Ce faisant, le particulier conserve le contrôle des actifs et ne risque pas de voir une portion importante du capital soumis à l’imposition immédiate. Il devra toutefois maintenir le régime en vigueur avec les frais que cela comporte. Enfin, les prestations de retraite reçues directement d‘un RRI, peu importe l’âge du rentier, pourront faire l’objet de fractionnement avec le conjoint.
En conclusion, il existe donc trois options. Mais la plus prisée (le transfert au REER) est possiblement la moins fiscalement avantageuse. Il sera intéressant de questionner l’entrepreneur vendeur à savoir s’il est conscient des restrictions de décaissement du RRI.
LE RÉGIME DE RETRAITE INDIVIDUEL EN SITUATION DE VENTE D’ENTREPRISE
Dans la mesure où l’on choisira le maintien du RRI et le paiement d’une prestation à même celui-ci, la vente de l’entreprise changera forcément la donne. Est-ce que l’acquéreur voudra continuer à prendre le risque d’investissement et de survie que constitue le maintien d’un régime de retraite à prestations déterminées même pour un seul participant ? Si la réponse est non, ce qui est par ailleurs très probable, l’entrepreneur vendeur pourrait transférer le RRI dans une compagnie de gestion et conserver celui-ci en vigueur aussi longtemps qu’il le voudra. On notera toutefois que certaines règles devront être respectées pour que ce transfert soit possible.
SE CONSTITUER UN REVENU DE RETRAITE AVEC DES ACTIFS NON ENREGISTRÉS
Une fois la vente effectuée, il est probable que l’entrepreneur vendeur dispose d’actifs non enregistrés importants. Dans ce contexte, comment se constituer un revenu de retraite fiscalement efficace ? Voici trois des options à envisager :
Un peu comme dans le cas du RRI évoqué précédemment, est-ce que le particulier au profil entrepreneur favorisera cette option ? Dans l’affirmative, le traitement fiscal de cet outil en fera possiblement un choix intéressant. Il s’agit essentiellement d’une rente (viagère ou certaine) pour laquelle la portion intérêts est répartie également année après année. En effet, dans une situation de décaissement, le capital non enregistré qui s’épuise au fil des ans s’accompagne, toutes choses étant égales par ailleurs, d’une facture fiscale qui diminue aussi au cours des années. La résultante, un fardeau fiscal qui diminue au fil des ans, implique des revenus nets initiaux plus faibles. La rente prescrite permet au contraire de toucher un revenu net stable au fil des ans et apporte au rentier une sécurité du revenu. Mais il y a quand même une perte du contrôle du capital.
Aussi appelée rente « back-to-back », cette combinaison de rente viagère prescrite et d’assurance vie permet de reproduire les caractéristiques d’une obligation ou d’un dépôt garanti tout en bonifiant le rendement hors REER de ces produits de placement. Une portion de la rente après impôts servira à payer la prime d’une assurance vie qui reconstituera le capital au moment du décès. Il faut toutefois comprendre que cette stratégie, quoique possiblement pertinente, ne pourra par la suite être brisée en raison de la portion rente viagère. Le souscripteur devra aussi être assurable pour la portion assurance vie de la stratégie, ce qui pourrait ne pas être le cas. On notera également que la couverture d’assurance pourrait, éventuellement, être réduite si les objectifs du particulier devaient changer en cours de route.
Finalement, les taux prescrits de l’Agence du revenu du Canada (ARC) historiquement bas (présentement 1 %) permettent des prêts fiscalement avantageux au conjoint. Dans la mesure où un prêt est effectué au moins au taux prescrit, les règles d’attribution entre conjoints ne s’appliquent pas. Des règles spécifiques doivent être respectées, mais si le conjoint de l’entrepreneur vendeur a un taux d’imposition marginal plus faible que ce dernier, voici une façon d’améliorer l’efficacité fiscale des placements du couple. Il s’agit d’effectuer un prêt au conjoint – ces sommes étant ensuite investies par ce conjoint. Cette stratégie permettra aussi possiblement au conjoint d’utiliser des pertes en capital non utilisées. Les gains en capital générés par les placements provenant du prêt viendront éventuellement éponger ces pertes. Parmi les règles à respecter, mentionnons notamment :
Quoique cette dernière stratégie ne constitue pas une option de décaissement comme telle, elle constitue une façon d’optimiser les placements non enregistrés du couple, ce qui ne manquera pas de bonifier les revenus de retraite.
La préparation de la retraite d’un entrepreneur vendeur s’avère fréquemment plus complexe que celle d’un autre particulier. Notamment, le caractère spécifique de ces particuliers va souvent teinter les recommandations et l’écoute de celles-ci.
Deux questions à poser lorsqu’un client entrepreneur prend sa retraite :
1 Y a-t-il des mécanismes prévus pour garantir la longévité de toute proportion déterminée de capital à décaisser pour financer le coût de vie à la retraite ?
2 A-t-on une stratégie de préservation de capital advenant une détérioration de la santé et, ultimement, une perte d’autonomie ?
Jean-Guy Grenier, BAA, CMC, Adm.A., Pl. Fin., directeur régional – Elite, Développement et Mise en marché, Assurance et Épargne pour les particuliers, Desjardins Sécurité financière, Montréal.
Martin Dupras, A.S.A., Pl.Fin., D.Fisc., ConFor financiers inc.
• Ce texte est paru dans l’édition de décembre 2012 de Conseiller. Il est aussi disponible en format PDF.
Vous pouvez également consulter l’ensemble du numéro sur notre site Web.
[1] Le transfert admissible est égal à 2000 $ par année de service avant 1996 plus 100 $ par année de service avant 1989 (dans la mesure où aucune cotisation à un régime de retraite n’est acquise durant ces années). [2] Règles de transfert maximum entre un régime de pension agréé et un régime enregistré personnel (RIR 8517).
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