Fascicules de l’AMF : le débat sur la publicité relancé

25 novembre 2010 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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AMF_100Le débat sur la présence de réclames commerciales dans quatre fascicules qu’a récemment publiés l’Autorité des marchés financiers (AMF) n’est plus seulement un coup de grogne des professionnels de l’industrie. Voilà maintenant que la presse grand public s’interroge sur la pertinence de publicités des grandes institutions financières dans des documents gouvernementaux.

Dans La Presse du mercredi 24 novembre, le journaliste vedette Michel Girard écrit à propos de la publicité de la Banque Nationale : « Je trouve pour le moins paradoxal de voir que l’institution financière la plus impliquée et la plus pénalisée dans la crise du PCAA puisse devenir le plus important annonceur et partenaire des nouveaux fascicules éducatifs de l’AMF. Que l’on me comprenne bien. Je ne suis pas contre l’utilisation à de vraies fins éducatives des millions de dollars de sanction imposés à la Banque Nationale. Je suis contre le fait que l’AMF cautionne la propagande de la Banque Nationale. »

Michel Girard fait ainsi écho à nos nombreux lecteurs qui, informés par Conseiller.ca, ont réagi rapidement et vivement à l’initiative de l’AMF. « Toute documentation provenant de cette autorité financière devrait être autofinancée par l’État, et non par des entreprises privées. Ce n’est pas comme dans le cas de revues privées, journaux de finances et autres. Dans le privé, il faut – ou encore on peut – faire appel aux entreprises privées pour ce qui a trait au financement. Dans les documents de nature publique, il est plus approprié d’avoir les mains libres », estimait, dès le début de novembre, un planificateur financier indépendant de la région de Québec.

Après Conseiller.ca, l’AMF répond à La Presse Dès qu’un premier lecteur de Conseiller.ca, un pl. fin. de la région de Québec, a commencé à manifester des préoccupations, nous avons demandé à l’AMF de les commenter. Le 8 novembre dernier, l’AMF nous a répondu ceci :

« Votre lecteur soulève un aspect pertinent, sur lequel l’Autorité des marchés financiers s’était penchée dans l’élaboration de cette stratégie. Cela dit, ce projet s’inscrit dans la mission de l’Autorité qui est de protéger les investisseurs, notamment en leur fournissant de l’information objective leur permettant de prendre des décisions éclairées. Tout comme avec les éditions Protégez-vous, l’Autorité s’est assurée de conserver le plein contrôle du contenu éditorial et publicitaire des fascicules en demeurant le principal commanditaire de l’initiative. »

Le journaliste Michel Girard a lui aussi demandé à l’AMF d’expliquer son association avec la Banque Nationale et Desjardins, notamment, qui ont acheté des espaces publicitaires dans les fascicules.

Réponse de l’AMF, presque identique à celle que nous avons reçue :

« 1- La publication de fascicules par l’intermédiaire de Gesca permet de rejoindre plus de 440 000 foyers québécois.

2- Ce projet s’inscrit dans la mission de l’Autorité des marchés financiers qui est de protéger les investisseurs, notamment en leur fournissant de l’information objective leur permettant de prendre des décisions éclairées.

3- Tout comme avec les éditions Protégez-Vous, l’Autorité s’est assurée de conserver le plein contrôle du contenu éditorial et publicitaire des fascicules en demeurant le principal commanditaire de l’initiative et en excluant toute publicité visant à promouvoir directement des produits ou services financiers. Merci et bonne fin de journée. »

Manque d’objectivité et de neutralité Entre-temps, nos lecteurs continuent de nous envoyer leurs réactions. En choeur, ils condamnent la présence de publicité commerciale dans les brochures de l’AMF.

Voici trois exemples :

« Nous dénonçons la participation des institutions financières dans ce document éducationnel. Compte tenu d’une perception étroite entre l’AMF et les institutions financières participantes, nous sommes d’avis que ces commandites peuvent biaiser et influencer le choix de la population. Nous sommes d’avis que l’AMF a manqué d’objectivité et de neutralité, non seulement envers les consommateurs, mais aussi envers tous les conseillers indépendants et autonomes de l’industrie financière. Imaginons que le message porte à croire que les épargnants seraient davantage en sécurité avec les grandes institutions financières. Voilà notre plus grande craint », estime le Regroupement indépendant des conseillers de l’industrie financière du Québec.

« Effectivement, le document aurait du être neutre car vous (NDLR: l’AMF) laissez penser que les institutions nommées sont des collaborateurs associés à cette publication. Pour un organisme qui défend le public et réglemente la distribution des produits financiers et notre façon de nous afficher, c’est pas fort, fort. Est-ce que c’était un autre exemple de PPP pour financer cette publication à rabais ? Publication qui est, en passant, excellente », écrit Frédéric, un professionnel de l’industrie travaillant en Estrie.

« Encore une belle façon pour des institutions (financières) d’utiliser l’AMF pour promouvoir leur pratique et de façon indirecte, démontrer qu’ils ont le cautionnement moral de cette instance qui doit protéger le public. Ces mêmes institutions sont celles qui réussissent à construire des produits financiers et à instaurer des objectifs de ventes qui sont loin d’être dans l’intérêt de leurs clients, mais plutôt dans l’intérêt de leur profits trimestriels », souligne Patrice, planificateur financier.

Les faits, vos réactions Pour lire ou relire ce que Conseiller.ca a publié sur le sujet jusqu’ici, il suffit de cliquer sur l’un ou l’autre des articles suivants :

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