Marchés : le bon côté des montagnes russes

Par Philippe Pratte | 6 octobre 2018 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Photo : Parinya Agsararattananont / 123RF

Le mot d’ordre en octobre est volatilité. Il se range au premier rang des mois où l’on enregistre les plus grandes fluctuations en ­Bourse. Une tendance volatile demeure relativement facile à prédire et il est donc important de bien se préparer. Octobre est également un des mois les plus craints en finance… de mise avec l’Halloween qui approche!

Au fil des années, plusieurs mauvaises journées qui ont marqué l’histoire ont eu lieu durant ce mois.

C’est le cas du krach de 1987, qui a culminé lors de ce qu’on a appelé le « lundi noir ». Le 19 octobre 1987, le ­Dow ­Jones a perdu plus de 22 %, la seconde plus importante baisse jamais enregistrée en une seule journée sur un marché d’actions, après le krach de la bourse islandaise en 2008.

Comment alors se préparer à la volatilité d’octobre ? ­Il est important de se rappeler qu’un repli rapide doublé d’une augmentation prompte du ­VIX (l’indice de volatilité suivant le S&P 500), dans un environnement expansionniste où les bénéfices des sociétés sont en croissance, représente une occasion d’achat.

Pour l’instant, le rendement des sociétés américaines devrait continuer à s’améliorer. Le produit intérieur brut des ­États-Unis ne cesse de surprendre avec une croissance de 4,2 % au dernier trimestre.

Les assouplissements fiscaux de ­Donald ­Trump vont affecter positivement les entreprises, et nous prévoyons une augmentation des programmes de rachat d’actions, qui pourraient atteindre un trilliard de dollars américains au cours de la prochaine année. Du jamais vu !

Le président américain demeure tout de même un individu mystérieux et imprévisible, mais les hausses de volatilité à court terme qu’il engendre en gazouillant de manière émotive ne cessent de créer des occasions intéressantes.

Historiquement, les premiers et quatrièmes trimestres de l’année sont les meilleurs sur les marchés financiers. Les mois de novembre, décembre et janvier se distinguent particulièrement. Ce qui fait qu’en octobre, plusieurs investisseurs aiment se préparer en achetant pendant le repli, en vue des trois prochains mois, qui ont tendance à offrir de bonnes performances.

Octobre débute en territoire positif, mais la seconde moitié du mois a tendance à se terminer négativement. Par exemple, en octobre 2016, tous les principaux secteurs du S&P 500 ont viré au rouge. Néanmoins, cette période recèle de nombreuses occasions alors que plusieurs secteurs débutent leur hausse saisonnière.

La vente au détail

On le sait, les grandes chaînes américaines aiment commencer à vendre la marchandise de ­Noël plusieurs mois à l’avance. Octobre s’avère donc un excellent mois pour cette industrie, puisque plusieurs consommateurs commencent déjà à se procurer leurs cadeaux des ­Fêtes. Investir dans le détail vers la fin du mois, soit juste avant que l’achalandage du magasinage de ­Noël ne prenne de l’ampleur, constitue une bonne stratégie.

Le secteur de la vente au détail est à la baisse durant les mois estivaux. Les investisseurs, tout comme les consommateurs, le délaissent durant l’été pour y revenir à l’automne, au mois d’octobre. De 1990 à 2015, les deux meilleurs mois de ce secteur étaient mars et novembre. Octobre est donc la période tout indiquée pour bien s’y préparer.

Il demeure toutefois primordial d’investir au bon moment. Nous recommandons d’y effectuer un placement un mois avant le ­Black ­Friday (la course aux soldes qui suit l’Action de grâce aux ­États-Unis à la fin novembre), ce qui assure une position bien établie et permet aussi d’utiliser à pleine capacité le repli et la volatilité que peuvent produire les vieux souvenirs du lundi noir.

Mettez vos lunettes roses

Malgré cette volatilité, octobre obtient tout de même une bonne performance moyenne. Depuis 2000, il se classe au troisième rang des résultats mensuels, avec des gains de 1,84 %.

Il a la réputation d’être un « bear killer » (de l’expression bear market, marché baissier) : plusieurs marchés haussiers ont débuté pendant ce mois. La volatilité d’octobre peut en effet être profitable. Le meilleur exemple des dernières années est sans doute l’arrêt des activités gouvernementales fédérales américaines en 2013, ce qui avait créé de la volatilité temporaire, suivie d’une hausse du S&P 500.

Dans les cinq dernières années, celui-ci a enregistré des gains moyens de 3,07 % en octobre, les secteurs les plus performants étant la finance et la technologie, avec des résultats respectifs de 3,42 % et 4,87 %. Le seul secteur en territoire négatif pendant le mois est celui des télécommunications, lesquelles ont reculé de 0,65 % en moyenne depuis cinq ans.

Les données sur dix ans du S&P 500 sont par contre moins bonnes et concordent avec les craintes entourant le lundi noir. Le mois d’octobre présente ainsi une hausse moyenne de 0,89 % pendant cette période.

Plusieurs autres indices américains affichent la même tendance, dont le ­Nasdaq, qui a progressé en moyenne de 3,53 % sur cinq ans au mois d’octobre. Même le ­Dow ­Jones impressionne avec une moyenne haussière de 3,34 % pendant les cinq dernières années.

En ­Europe, nous avons détecté une envolée semblable. L’indice ­Euro ­Stoxx 50, qui suit les blue chips (actions des sociétés de grande qualité) de la zone euro, affiche une augmentation de 3,35 % au mois d’octobre sur cinq ans.

L’Asie performe aussi très bien et profite de cette hausse. Le ­Nikkei 225, représentant les 225 plus grandes sociétés japonaises, a connu une hausse moyenne de 4,88 % depuis les cinq dernières années.

Chez nous

Au ­Canada, le mois d’octobre a tendance à être un peu moins intéressant. La performance n’est pas au ­rendez-vous comme dans les autres grands marchés développés. Le ­TSX a réussi à se hisser de 1,35 % en moyenne depuis cinq ans. Ce n’est pas mauvais, mais lorsque comparé aux autres indices, le ­TSX n’est pas à la hauteur.

Les deux secteurs de la consommation, autant la consommation discrétionnaire que la consommation de base, font bien au mois d’octobre. La finance enregistre aussi de bons résultats tandis que le secteur de la santé canadien, lui, implose en octobre avec une baisse moyenne de 11,41 % sur cinq ans. Il faut dire qu’il a connu une diminution de 45,75 % en octobre 2015 en raison des déboires de ­Valeant, ce qui contribue fortement à ces données peu reluisantes. Des chiffres qui en disent long !

Le bilan du mois d’octobre des cinq dernières années reste positif. Par contre, la majorité des indices que nous avons analysés ont enregistré une hausse moyenne de moins de 1 % sur dix ans, raison pour laquelle les investisseurs considèrent qu’il peut être dangereux.

Les souvenirs du lundi noir et du début de la crise de 2008 ont toujours tendance à refaire surface au début de l’automne. Mais depuis les dernières années, nous ne pouvons faire autrement qu’en profiter.

Malgré les nombreuses craintes, un investisseur bien préparé peut très bien obtenir de bons rendements de ce mois volatil, à condition de bien surveiller les tendances qui surviennent.

Philippe ­Pratte est président, chef des investissements et gestionnaire de portefeuille chez ­Pratte ­Gestion de portefeuilles.

Les opinions (y compris les recommandations, s’il y a lieu) exprimées dans le présent billet sont celles de l’auteur seulement et ne représentent pas nécessairement celles de Pratte Gestion de portefeuilles, ni celles de Conseiller. Ce texte ne doit pas être considéré comme un conseil personnel de placement ou une sollicitation d’achat ou de vente de titres. Les renseignements qu’il contient proviennent de sources considérées comme fiables, mais leur exactitude et leur exhaustivité ne peuvent être garanties. L’auteur, Pratte Gestion de portefeuilles et Conseiller n’assument aucune responsabilité quant aux erreurs qui pourraient s’y glisser.


• Ce texte est paru dans l’édition d’octobre 2018 de Conseiller. Vous pouvez consulter l’ensemble du numéro sur notre site Web.

Philippe Pratte