Accueil Breadcrumb caret Nouvelles Breadcrumb caret Fiscalité Breadcrumb caret Blogues Breadcrumb caret François Bernier Instaurer une fiducie Henson Afin de complémenter un REEI. Par François Bernier | 9 octobre 2012 | Dernière mise à jour le 16 août 2023 7 minutes de lecture bialasiewicz / 123RF Le régime enregistré d’épargne-invalidité (REEI) est un outil précieux qui permet aux parents d’enfants handicapés d’assurer la sécurité financière de ces derniers, en leur permettant de placer des sommes dans un régime enregistré, en franchise d’impôt, tout en recevant des subventions et possiblement un bon du gouvernement fédéral. Toutefois, le REEI possède une contrainte importante : il n’est permis d’y contribuer qu’un maximum de 200 000 $ à vie. De nombreux parents qui ont des actifs importants au moment de leur décès, ou qui ont souscrit une police d’assurance vie, désireraient une option supplémentaire afin de voir à la gestion de ces actifs destinés à leurs enfants handicapés. Cette option existe : il s’agit de la fiducie discrétionnaire, plus communément connue sous le nom « fiducie Henson ». Qu’est-ce qu’une fiducie Henson? La « fiducie Henson » doit son nom à Audrey et Leonard Henson. Audrey, la fille de Leonard Henson, avait un handicap intellectuel et recevait des prestations d’aide sociale de la province de l’Ontario. Leonard souhaitait assurer sa sécurité financière après son décès et avait donc rédigé un testament. Ce testament prévoyait la création d’une fiducie conçue afin de gérer et protéger les actifs légués à Audrey au moment de son décès. La fiducie créée dans le testament étant entièrement discrétionnaire, c’est-à-dire que les fiduciaires pouvaient à leur entière discrétion verser des sommes à Audrey dans le but d’améliorer sa qualité de vie. Audrey n’avait pas le droit d’exiger des versements en provenance de la fiducie. Par ailleurs, les fiduciaires pouvaient s’abstenir d’effectuer des versements à Audrey s’ils estimaient que de tels versements pourraient nuire à son admissibilité à un soutien de l’État. À la suite du décès de Leonard, le ministère des Services sociaux de l’Ontario a mis fin aux prestations de soutien offert à Audrey, déclarant que les fiduciaires devraient assurer sa subsistance jusqu’à ce que son héritage soit entièrement liquidé. Une fois les fonds épuisés, elle pourrait ensuite demander à nouveau une prestation d’aide sociale. Les fiduciaires se sont opposés à la décision du gouvernement et l’affaire a abouti devant la Cour d’appel de l’Ontario. En septembre 1989, la cour a jugé qu’une personne handicapée pouvait hériter d’une somme placée dans une fiducie discrétionnaire, sans que cela ne nuise à son admissibilité à l’aide gouvernementale. Il ne serait pas nécessaire que les sommes placées dans une telle fiducie soient liquidées pour avoir droit à un soutien de l’État. Effets de la fiducie Henson sur les prestations d’invalidité Ce jugement a fait jurisprudence au Canada et est depuis appliqué dans de nombreuses provinces. Au Québec, en vertu de la Loi sur l’aide aux personnes et aux familles, les sommes placées dans une fiducie totalement discrétionnaire ne constituent pas des actifs liquides de la personne handicapée et n’ont pas à être liquidées avant que cette dernière soit éligible à recevoir des prestations de solidarité sociale. Tant qu’aucun revenu en provenance de la fiducie n’est versé à la personne handicapée, il n’y a aucune incidence sur la prestation de solidarité sociale. Les tribunaux ont reconnu cette interprétation à de nombreuses reprises et, si la fiducie est bien rédigée, elle devrait protéger les actifs de la personne handicapée et prévenir toute coupure des prestations de solidarité sociale. Avantages de la fiducie Henson Outre le fait qu’elle permet de protéger les prestations de solidarité sociale, les fiducies de type Henson comportent plusieurs autres avantages. En premier lieu, la limite des cotisations à un REEI est fixée à 200 000 $. La fiducie de type Henson peut donc s’avérer un outil intéressant lorsqu’un enfant à charge hérite de plus de 200 000 $ de la part de ses parents ou grands-parents. En effet, la Loi de l’impôt sur le revenu permet aux parents ou aux grands-parents de procéder, à leur décès, à un roulement sans impact fiscal de leur REER, FERR ou RPA au REEI de leur enfant ou petit-enfant handicapé. La fiducie Henson peut aussi être utilisée par les fiduciaires dans le but de « diriger » des cotisations à un REEI au profit du bénéficiaire, ce qui permet non seulement de protéger les actifs, mais aussi de tirer profit des subventions et bons de contrepartie de l’État, accroissant ainsi le patrimoine du bénéficiaire. Également, il faut noter que les sommes cotisées à un REEI constituent un don irrévocable au bénéficiaire. Elles ne peuvent pas être « reprises » par le donateur et sont intégrées à la succession du bénéficiaire à son décès. Dans de nombreux cas, la personne handicapée ne pourra procéder à la rédaction d’un testament en raison de son handicap; les sommes détenues dans son REEI seront donc dévolues selon les règles portant les successions ab intestat établies dans le Code civil du Québec. La fiducie Henson, de son côté, permet de nommer un bénéficiaire résiduel qui succédera à la personne handicapée à son décès. Ceci est particulièrement utile lorsque le bénéficiaire est frappé d’une incapacité intellectuelle ne lui permettant pas de rédiger un testament. On peut aussi avoir recours à une fiducie Henson pour contrôler l’accès aux fonds et assurer une bonne gestion des biens. Ceci pourrait être une option souhaitable lorsque le bénéficiaire n’est pas mentalement inapte, mais qu’il est mal renseigné sur le plan financier ou lorsqu’il a de mauvaises habitudes de vie (s’il est dépensier, par exemple). Enfin, la fiducie Henson est une option flexible. Les subventions et les bons du gouvernement qui sont versés dans un REEI au cours des dix années qui précèdent un retrait devront être remboursés au gouvernement. La fiducie Henson ne comportant pas de telle exigence, elle pourrait être plus avantageuse pour ce qui est des retraits à court terme. Il convient cependant de noter que, contrairement au REEI, les cotisations versées dans une fiducie Henson ne donnent pas droit à des subventions et aux bons de l’État et que les retraits à même une fiducie Henson auront en général des répercussions sur les prestations fondées sur le revenu. Comment établir une fiducie Henson Il est possible d’établir une fiducie Henson pour le compte de toute personne handicapée. L’établissement d’une fiducie Henson est toutefois plus coûteux et plus complexe que la mise sur pied d’un REEI et il vous faudra faire appel à un notaire ou à un avocat ayant des connaissances dans ce domaine. La fiducie peut être créée par le parent de son vivant ou au moment de son décès. Les fiducies établies du vivant sont considérées comme des fiducies entre vifs aux fins de l’impôt, ce qui signifie que la totalité du revenu et de la croissance découlant des placements sera en général imposée au taux marginal le plus élevé. Si le bénéficiaire est un mineur, il pourrait être préférable de détenir des placements ne produisent que des gains en capital, afin d’éviter que le bénéficiaire de la fiducie ne soit assujetti à l’impôt en vertu des règles d’attribution. Par ailleurs, dans le cas des fiducies entre vifs, il faudra qu’une personne autre que le bénéficiaire soit nommée fiduciaire (par exemple un membre de la famille ou un ami proche), afin d’éviter que les dispositions du paragraphe 75(2) de la Loi de l’impôt sur le revenu ne s’appliquent et que la totalité du revenu et des gains en capital ne soit imposée entre les mains de la personne handicapée. La fiducie Henson peut aussi être intégrée à un testament. Elle serait ainsi considérée comme une fiducie testamentaire, ce qui permettra une imposition à un taux progressif. Fiducie Henson et REEI Le REEI et la fiducie Henson se complémentent très bien. Le REEI peut souvent former la base d’une stratégie pour assurer la sécurité financière d’un enfant handicapé. Toutefois, pour des parents ayant des actifs importants, la fiducie discrétionnaire constitue souvent un outil indispensable. Il est important pour les parents d’enfants handicapés de discuter, avec leur conseiller et avec leur conseiller juridique, de la meilleure façon d’assurer la protection et la gestion des actifs de leur enfant handicapé. La fiducie discrétionnaire doit, dans ce contexte, recevoir bonne considération. François Bernier François Bernier est notaire. Il occupe le poste de directeur, techniques de planification avancées à la Financière Sun Life. Sauvegarder Stroke 1 Imprimer Group 8 Partager LI logo