Campagne de l’AMF : au détriment des conseillers indépendants ?

Par Ronald McKenzie | 6 novembre 2009 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Le moins qu’on puisse dire, c’est que la campagne médiatique « Avant d’investir, investiguez ! », que l’Autorité des marchés financiers (AMF) lancera officiellement lundi prochain, ne laisse personne indifférent.

Elle est loin d’enchanter Léon Lemoine, président sortant du Regroupement indépendant des conseillers de l’industrie financière du Québec (RICIFQ). « Après consultation et discussion auprès des membres du conseil du RICIFQ, nous en sommes venus à la réflexion que le message véhiculé […] saura davantage créer un climat de méfiance et de suspicion que de confiance auprès du grand public », a-t-il indiqué à l’AMF.

Concrètement, le RICIFQ ne participera ni à la diffusion ni à la promotion de cette campagne qui a coûté 1 million de dollars, dont 750 000 $ sont investis pour diffuser une série de publicités à la télévision, à la radio et des les médias écrits.

L’organisme de défense des conseillers indépendants insiste pour dire que les investisseurs doivent être mieux informés sur les différents produits et services offerts par l’industrie. Le RICIFQ est aussi d’accord avec le fait que ces investisseurs ne doivent doit pas manifester une confiance aveugle envers leur conseiller et qu’ils sont en droit de recevoir une seconde opinion.

Mais la campagne de sensibilisation de l’AMF ne va pas dans ce sens, soutient le RICIFQ. « Si effectivement les investisseurs deviennent des investigateurs, il leur sera plus facile d’enquêter auprès des conseillers indépendants que de ceux qui travaillent dans une grande institution financière », dit Léon Lemoine. Ils pourraient conclure que, finalement, c’est plus sûr et moins compliqué de faire affaire avec les poids lourds de l’industrie et avoir la tentation d’y transférer leurs avoirs, indique Léon Lemoine. Ce qui pourrait nuire aux conseillers indépendants.

Les planificateurs financiers ne sont pas visés De son côté, l’Institut québécois de planifications financière (IQPF) ne se sent pas que ses membres sont directement visés par la campagne de l’AMF. « Quand on parle d’investissement, on parle de placement. Or, les planificateurs financiers offrent des conseils. Ils ne vendent pas de placements », a souligné Jocelyne Houle-LeSarge.

Autrement, la présidente-directrice générale de l’IQPF estime que le message télé mettant en vedette l’animateur Guy Mongrain est accrocheur et incite les investisseurs à se prendre en main, ce qui est une bonne chose, selon elle. « Le citoyen doit savoir à qui il a affaire. Il a la responsabilité de poser les bonnes questions. Et ça, il faut le lui dire », a ajouté Jocelyne Houle-LeSarge.

L’animateur vedette a lui-même perdu 300 000 $ en 1992-1993. Le fraudeur a été condamné à quatre ans d’emprisonnement.

Campagne trop prudente Pour sa part, Michel Nadeau croit que l’initiative de l’AMF est trop prudente. Directeur général de l’Institut sur la gouvernance d’organisations privées et publiques, il a assisté mardi matin à une présentation de la campagne, à laquelle l’AMF a convié un petit groupe de personnes du monde de la finance. Le. « Elle aurait dû mener une campagne beaucoup plus forte, avec un message clair. Comme les publicités que font parfois la CSST et la SAQ », dit Michel Nadeau. Par exemple : si votre courtier vous propose des produits que vous ne comprenez pas, ne les achetez pas. Ou encore : demandez une deuxième opinion. « La campagne de sensibilisation de l’AMF est gentille, mais elle n’envoie pas un message clair aux consommateurs », martèle-t-il.

Michel Nadeau réfute l’idée que la campagne de l’AMF risque de créer un climat de méfiance vis-à-vis des conseillers. « Earl Jones se faisait passer pour un conseiller financier et il a fraudé des dizaines de consommateurs. Les conseillers financiers ne doivent pas jouer aux malheureux. Ils doivent s’assurer qu’on fait le ménage en leur sein », conclut Michel Nadeau.

Consultez le guide Votre guide personnel contre de la fraude, préparé par l’AMF.

Ronald McKenzie