Chaîne de blocs : la prochaine grande révolution

Par Nathalie Côté | 14 septembre 2018 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Quel sera l’incidence de la chaîne de blocs (blockchain) dans l’univers de la finance et dans d’autres domaines? « C’est une tendance qui va bouleverser le monde », a lancé d’entrée de jeu Francis Nadeau, d’Hydralab, lors du colloque Femmes en finance. Les défis sont toutefois nombreux.

Au départ, la chaîne de blocs est née d’un problème lié à Internet : la possibilité de la double dépense. « Le défi, c’était de prouver qu’une personne n’a pas donné le même dollar virtuel à deux personnes différentes sans intermédiaire, indique Chadi Habib, du Mouvement Desjardins. C’est là que ça a commencé. »

COMMENT ÇA FONCTIONNE?

La chaîne de blocs est surtout connue pour avoir permis la naissance du bitcoin et d’autres cryptomonnaies. Il s’agit d’un registre informatique distribué sur des ordinateurs partout sur la planète. Toutes les transactions y sont horodatées et elles sont immuables, on ne peut les modifier.

Au départ, cette technologie a été créée dans l’optique d’une utilisation publique. Elle pourrait toutefois aussi être utilisée dans un réseau privé.

QUELLES APPLICATIONS?

Dans les prochaines années, la chaîne de blocs pourrait permettre d’acheter une maison sans faire appel à tous les intermédiaires comme le courtier, l’institution financière et le notaire, croit Chadi Habib, du Mouvement Desjardins. Mais ce n’est pas tout. Acheter des produits financiers sans intermédiaires, assurer la traçabilité de produits alimentaires et autres, voter de manière électronique : le potentiel est énorme.

Pour l’instant, un faible pourcentage de ce potentiel est exploité, mais des initiatives connaissent du succès. « Une entreprise a développé une assurance voyage avec laquelle un retard de vol entraîne automatiquement une compensation », cite en exemple M. Habib. Pour y parvenir, elle utilise une base de données des vols internationaux.

QUELS SONT LES PRINCIPAUX DÉFIS?

L’utilisation de la chaîne de blocs soulève plusieurs préoccupations et les défis sont nombreux. On l’a déjà vu avec Internet, l’absence de frontières complique grandement la réglementation, par exemple. « On ne peut pas créer notre propre cadre réglementaire juste au Québec, il faut qu’on travaille avec nos pairs, dit Lise-Estelle Brault, de l’Autorité des marchés financiers. Il y a présentement une prolifération de comités internationaux à ce sujet et nous y sommes très actifs. »

En collaboration avec des experts de l’Université Concordia, l’organisation a aussi créé son propre laboratoire, où elle essaie de bâtir une Bourse avec la chaîne de blocs. « Nous n’avons pas pour objectif de réussir, nous voulons apprendre à travers ça, explique Mme Brault. On constate plusieurs problèmes, si deux ordinateurs qui participent à la chaîne de blocs ne sont pas à la même heure, par exemple. »

La question de la sécurité est aussi primordiale. « Les éléments fondamentaux de la chaîne de blocs sont très robustes, indique Jean-François De Rico, de Langlois Avocats. Les épisodes où des criminels ont eu du succès, c’est en s’attaquant à des logiciels et applications qui interagissent avec la blockchain. Il y a eu des histoires d’horreur et il va continuer d’y en avoir. Il faut que le régulateur s’y intéresse et que l’industrie soit partie prenante du développement de standards pour qu’on atteigne une certaine sécurité. »

Il va sans dire que la chaîne de blocs va aussi bouleverser le modèle d’affaires de plusieurs entreprises, notamment dans le domaine financier. Réduire les frais et les intermédiaires va les pousser à revoir leurs façons de faire. Cela comporte des défis, mais aussi des occasions, estime Geneviève Mottard, de l’Ordre des comptables professionnels agréés du Québec. « Actuellement, une grosse partie de notre travail consiste à vérifier des affaires, illustre-t-elle. La chaîne de blocs va nous permettre d’avoir plus de temps pour autre chose. »

Nathalie Côté