Des analystes européens inquiets de « la folie immobilière canadienne »

Par Fabrice Tremblay | 22 mai 2012 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
3 minutes de lecture

À l’instar de certains économistes canadiens, des analystes européens estiment que le marché immobilier canadien va connaître une baisse prononcée. Le réputé groupe de recherche LEAP/E2020 fait une lecture pessimiste de la situation, dans un article de son bulletin d’avril, offert uniquement sur abonnement.

Les experts de LEAP/E2020 s’attendent à une chute des prix de 15 % à 25 % en trois ans, à partir de 2013. Sur 10 ans, la baisse des prix dans les grandes villes canadiennes serait en moyenne de 45 %, soutiennent même les auteurs de l’article. L’article est intitulé « La folie immobilière canadienne, répétition des erreurs américaines – vers une chute de 15 % à 25 % des prix à partir de 2013 ».

Les analyses du Laboratoire européen d’anticipation politique/Europe 2020 sont prisées notamment depuis que le groupe de recherche avait prévu, dès 2006, la crise financière de 2007-2008.

LA SCHL DANS LA MIRE  Les analystes du groupe de recherche mettent en évidence le rôle de la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL) dans le système financier canadien, et la situation périlleuse dans laquelle l’organisme fédéral se trouverait actuellement. La « SCHL est devenue l’une des plus importantes institutions financières du pays en tant que principal assureur d’emprunts immobilier et émetteur de “morgage backed securities” (MBS) (titres adossés à des hypothèques) » souligne l’article. Les auteurs comparent la SCHL à Fannie Mae et Freddie Mac, les institutions américaines qui se sont retrouvées au cœur de la tourmente en 2008.

« La SCHL se retrouve dans une situation financière encore plus précaire que Fannie Mae juste avant la débâcle immobilière aux États-Unis », peut-on lire dans l’article. Entre 2000 et 2010, le montant des prêts immobiliers assurés par la SCHL, qui disposait d’actifs nets d’environ 11 milliards de dollars, est passé de 200 milliards à 514 milliards de dollars, représentant 80 % du marché de l’emprunt immobilier, auxquels il faut ajouter la garantie apportée aux MBS, passée de 40 milliards de dollars à 326 milliards de dollars sur la même période, soit une exposition totale de 840 milliards de dollars », écrit-on.

PERSPECTIVES NÉGATIVES  Les chercheurs du LEAP/E2020 pointent vers plusieurs indicateurs d’une bulle immobilière. Ils reconnaissent que les marchés de Toronto et de Vancouver sont les plus spéculatifs. « Vancouver est ainsi devenue la deuxième ville la plus chère au monde derrière Hong Kong avec un ratio prix médian/revenus annuels bruts moyens de 10,6. En comparaison, un marché immobilier normal a un ratio prix médian/revenus annuels bruts inférieurs à 3. Un ratio supérieur à 6 est considéré comme “sévèrement inabordable” », écrivent-ils.

L’éclatement de la bulle immobilière commencerait d’ailleurs à Vancouver au début de 2013 et affecterait progressivement le reste du pays. « L’équipe de LEAP/E2020 anticipe également que, sur la base des ratios prix de vente/loyers historiques, le marché immobilier des grandes villes canadiennes va connaître une correction des prix d’environ 45 % en moyenne, affirme l’article. Les prix connaîtront une chute de 15 % à 25 % en trois ans et le reste de la correction sera lente et prendra probablement une décennie pour atteindre les prix plancher », est-il précisé. Montréal n’est pas exclue du phénomène puisque la métropole connaîtrait une baisse des prix de 35 %, au plus fort de la chute.

Les chercheurs européens concluent leur article en soulignant que « contrairement au reste du G8, le plus dur est à venir pour le Canada ».

Fabrice Tremblay