Enfreindre les règles du remue-méninge

Par La rédaction | 13 décembre 2022 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Le remue-méninge, ou brainstorming, est utilisé depuis des dizaines d’années dans les organisations pour résoudre certains problèmes qui échappent aux solutions habituelles. Ces séances de travail collectives ont pour objectif de débrider la créativité des équipes afin de faire jaillir des réponses inédites.

La bonne vieille méthode consiste à jeter toutes sortes d’idées dans la mêlée, sans se préoccuper du résultat final. Malgré l’aspect anarchique, à première vue, de la démarche, il existe certaines règles à suivre, comme ne pas se censurer, oser exprimer les idées les plus farfelues ou encore rebondir sur les idées des autres participants.

Toutefois, ces rencontres ne produisent pas toujours les résultats escomptés. Il arrive même souvent que les idées exprimées au cours des séances ne soient pas assez créatives. Il se peut aussi qu’elles ne répondent pas vraiment aux besoins actuels des organisations, ce qui peut engendrer des sentiments d’échec et de frustration, tant chez les employés qui y participent que chez les gestionnaires qui les convoquent.

QUANTITÉ OU QUALITÉ ?

Pour éviter de tomber dans ces pièges, Thomas GillierBarry L. Bayus respectivement professeurs en management et en marketing, expliquent dans Harvard Business Review France qu’il peut être salutaire parfois de briser les règles établies du remue-méninge pour obtenir de meilleurs résultats.

Ils s’appuient sur le fait que la majeure partie de la recherche des dernières années à propos du brainstorming serait basée sur une vision trop simplifiée du processus de créativité.

Selon cette vision, les participants sont considérés comme des générateurs d’idées. L’exercice vise souvent à sortir le plus grand nombre d’idées possible. Ces dernières sont évaluées après le processus, sur la base de leur originalité et de leur faisabilité.

Or la quantité n’est pas garante de la qualité. Des études démontrent que les groupes qui réussissent le mieux sont ceux qui produisent un nombre réduit de propositions originales, mais ayant une grande valeur pour les utilisateurs. Ces derniers, en plus de proposer des idées, cherchent en même temps des moyens de les rendre réalisables.

BRISER LE MOULE

Autre constat : les réflexions génèrent un moins grand nombre d’idées lorsqu’elles sont menées en groupe que quand elles émanent d’individus isolés. En outre, les idées émises dans le cadre de séances collectives sont souvent de moindre qualité, indiquent les auteurs de l’article.

Pour tirer le meilleur parti des séances de réflexion collective, les professeurs encouragent les organisateurs à briser les règles traditionnelles. Par exemple, ils suggèrent d’éviter de demander aux participants de dresser une longue liste d’idées. De plus, ils ne doivent pas rebondir sur toutes les idées, mais plutôt se concentrer sur les propositions qui semblent les plus intéressantes.

Les spécialistes recommandent également de favoriser un état d’esprit collaboratif entre les membres de l’équipe.

Un autre conseil qui peut paraître a priori contraire à l’esprit du remue-méninge consiste à encourager les participants à critiquer les idées des autres.

En effet, les chercheurs ont observé lors de séances de brainstorming que les idées ont tendance à converger. Au fil des discussions, un consensus tend à s’établir, ce qui nuit à l’émergence d’idées vraiment originales.

L’INDIVIDU AVANT LE GROUPE

Pour éviter cet écueil, les experts recommandent de laisser les gens amorcer la réflexion de manière individuelle pour éviter que les idées convergent trop rapidement. Ils ont observé que, dès qu’une personne lance une idée, la mémoire des autres membres du groupe s’en trouve affectée, et ils se mettent alors à considérer le problème de façon plus similaire.

Le fait de travailler seul permet au contraire aux idées originales de s’exprimer, car le cerveau de chaque personne emprunte un chemin différent pour réfléchir au problème.

Par ailleurs, les participants ont tendance à vouloir arriver rapidement à une solution et à précipiter la réflexion afin d’échapper au sentiment d’incertitude ressenti face au problème. Cet état d’inconfort pousse les participants à vouloir abréger le processus pour passer plus vite à l’action pour trouver une solution.

Or, pour que le processus soit riche, les groupes qui y prennent part doivent prendre le temps d’explorer plusieurs idées.

En conclusion, pour générer des idées fortes et innovantes, les échanges doivent être orientés pour que l’équipe ne se mette pas trop rapidement d’accord sur une solution, en tout cas pas avant que chacun ait eu l’occasion d’exprimer ce qu’il avait dire et qu’il ait été écouté.