Limitez les risques des FNB synthétiques : une vis n’est pas un clou

Par Mark Yamada | 16 juillet 2010 | Dernière mise à jour le 16 août 2023
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Les fonds négociés en Bourse (FNB) peuvent être regroupés en deux principaux types de stratégies suivies : les stratégies passives et les stratégies intégrées. Parmi les FNB conçus selon une stratégie intégrée, ceux qui ont recours à des dérivés se sont attiré les critiques des médias ainsi qu’une attention plus soutenue de la part des autorités de réglementation. Mais qu’en est-il des FNB qui utilisent des dérivés?

Les FNB d’options d’achat couvertes Même si leurs formes s’apparentent, il ne faut pas confondre une vis et un clou. Certes, l’une et l’autre joignent des éléments, mais les similarités s’arrêtent là. La vis a besoin de couple mécanique et le clou, de force de frappe. De la même manière, les « rendements » des actions privilégiées et des actions ordinaires sont différents des « rendements » obligataires et des « rendements » des options d’achat couvertes. Examinons les composantes sous-jacentes pour expliquer l’écart : les intérêts obligataires sont plus fiables que les dividendes d’actions privilégiées, lesquels sont plus permanents que les dividendes d’actions ordinaires, et les dividendes d’actions ordinaires sont beaucoup plus stables que les primes d’option.

Certains investisseurs croient que les FNB d’options d’achat couvertes qui versent des distributions mensuelles sont des produits générateurs de revenus à l’instar de fonds de dividendes ou obligataires. C’est une tentation qu’il faut éviter. Lisez les descriptions sur les sites web des promoteurs et les prospectus pour comprendre comment ces FNB sont construits et pourquoi il ne faut pas les mettre dans le même panier que les produits générateurs de revenus.

Si le facteur « temps » entre en ligne de compte pour évaluer une action privilégiée, surtout à l’approche de la date ex-dividende, ce facteur est au cœur même de l’évaluation d’une option. Non seulement la date d’expiration est-elle critique, mais le rapport entre le prix de levée et le cours du marché est une considération incontournable. Même la source du revenu n’est pas la même. Les flux de trésorerie découlant des primes d’options étant considérés comme des gains en capital, ils sont imposés à des taux plus élevés que ceux qui s’appliquent aux dividendes.

Les FNB d’options d’achat couvertes connaissent actuellement un vif engouement, ce qui ne surprend pas les vieux routiers du marché. En effet, lorsque les marchés boursiers sont instables et que les rendements sont faibles, la promesse de rendement accru découlant de la vente d’options d’achat adossées à des actions qui font du surplace est toujours une avenue alléchante. Les FNB ont démocratisé l’accès à cette tactique d’investissement. Pour négocier elle-même des options d’achat couvertes, une personne a besoin d’un compte sur marge. Or, les FNB ont éliminé cette formalité. Une option d’achat donne au titulaire le droit d’acheter un titre à un prix convenu (le prix de levée) pendant une période convenue (jusqu’à la date d’expiration). Une option de vente donne au titulaire le droit de vendre le titre aux mêmes conditions. Les options de vente et d’achat sont des dérivés négociés en Bourse qui, même si elles peuvent être utiles pour gérer les risques, peuvent représenter des coûts supplémentaires.

Rendement total du S&P 500 Indice CBOE S&P 500 Buy-Write, au cours Indice CBOE S&P 500 Buy-Write, 2 % hors cote
Rendement 9,6 % 9,6 % 12,7 %
Ecart-type 18,2 % 12,7 % 14,5

Du 1er février au 9 décembre 2011 ZWB ZEB
Rendement total – 3,75 % – 4,33 %
Écart-type 17,46 % 18,27 %

Qu’est-ce qu’une option d’achat couverte? Acheter un titre et vendre à quelqu’un le droit de vous le racheter : voilà le principe de la stratégie de vente d’option d’achat, ou stratégie d’achat-vente. Vous procédez ainsi si :

  • vous voulez vendre le titre de toute façon;
  • vous pensez que la personne est prête à payer un montant trop élevé pour ce droit.

Votre décision sera influencée par des facteurs de temps et de prix. Vous devez :

  • être prêt à vendre le titre au prix de levée avant la date d’expiration;
  • penser que l’acheteur de l’option de vente est trop optimiste par rapport aux perspectives du titre d’ici l’expiration;
  • vouloir protéger votre position contre une certaine baisse des cours.

Effet des options de vente couvertes sur le risque Les options de vente couvertes devraient être en mesure d’améliorer les rendements dans des marchés sans tendance affichant une baisse modérée, et de réduire le risque ou l’écart-type. Le fonds BMO vente d’options d’achat couvertes de banques canadiennes, le FNB de vente d’options d’achat couvertes affichant l’actif géré le plus important au Canada (620,7 M $ au 19 décembre 2011), est un bon exemple. Depuis son lancement le 1er février 2011, il s’est avéré une meilleure protection contre les marchés défavorables que le FNB BMO équipondéré S&P/TSX banques (ZEB), et ce, à un risque légèrement plus faible.

Certains FNB vendent des options d’achat sur la totalité des titres (BMO et Horizons Betapro), alors que d’autres se limitent à 25 % des titres détenus (XTF). Certains vendent hors cote (BMO et Horizons Betapro) et d’autres, sur les marchés (XTF). Si chaque type de FNB a sa place au soleil, comment les investisseurs peuvent-ils évaluer les différents risques?

Rendement des 3 FNB de vente d’options d’achat couvertes
Du 3 juin au 9 décembre 2011 ZWB HEF FXF
Rendement total -8,5 % -9,6 % -12,9 %
Écart-type 20,9 % 19,1 % 17,4 %

Le tableau ci-dessus illustre le rendement de trois FNB de vente d’options d’achat couvertes axés sur les services financiers, du 3 juin au 9 décembre 2011. Malgré la courte période illustrée, deux observations se dégagent :

  • La vente d’options d’achat visant la totalité des positions (ZWB de BMO et HEF de Betapro) offre une meilleure protection contre les marchés baissiers que la vente d’options visant 25 % des positions (FXF de XTF).
  • Dans des périodes de chute marquée des marchés (juillet et août), il peut être difficile d’obtenir une bonne protection. En effet, l’efficacité peut être freinée par des liquidités limitées et les coûts associés à une révision à la baisse (ou rolling down), soit le rachat d’options d’achat position courte et leur revente à des prix de levée inférieurs.

Lorsque les marchés connaissent un essor rapide, les FNB dont les options d’achat ne visent que 25 % des titres détenus devraient être plus profitables.

La différence entre le prix de levée plus prudent « au cours » de XTF (malgré la plus faible partie des titres visés) et les prix « légèrement hors du cours » de BMO et d’Horizon Betapro devrait correspondre à l’écart entre la valeur au cours et 2 % de la valeur hors du cours des indices CBOE S&P 500 Buy-Write, moins le risque.

Toujours vendre la volatilité Selon le vieil adage de Wall Street, il faut toujours vendre la volatilité et ne jamais l’acheter. Les stratégies fondées sur la vente d’options exploitent l’écart entre la volatilité implicite et la volatilité réalisée, c’est-à-dire la différence entre la peur de perdre (options de vente), l’ambition de faire de l’argent (options d’achat) et la réalité.

Le récent climat d’inquiétude s’est traduit par des écarts plus prononcés et des rendements supérieurs. Au fil du temps, la nervosité constante des marchés des capitaux a fait en sorte qu’il est devenu plus rentable de vendre des options d’achat que de les acheter. En d’autres mots, la marge entre la théorie et la réalité représente un profit potentiel pour les investisseurs. Les FNB d’options d’achat couvertes offrent à ces derniers un moyen d’exploiter les inefficiences de prix et de moduler le risque en fonction des titres sous-jacents.

Accordez donc plus d’attention à la gestion des risques des FNB d’options d’achat couvertes plutôt qu’à leur « rendement ».

Mark Yamada est le président et chef de la direction de PŮR Investing Inc., un cabinet de gestion de portefeuille et de développement de logiciel qui se spécialise en stratégies perturbatrices à l’intention des promoteurs de régimes de retraite, des investisseurs et de leurs conseillers. PŮR est un gestionnaire de portefeuille inscrit. www.purinvesting.com

Cet article est tiré de l’édition de mai du magazine Conseiller. Consultez-le en format PDF.

Mark Yamada