Trump pardonne le roi des obligations pourries

Par La rédaction | 21 février 2020 | Dernière mise à jour le 15 août 2023
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Donald Trump.
Photo : Mykhaylo Palinchak / 123RF

Michael Milken a récemment eu droit au pardon présidentiel de Donald Trump. Ce ténor de l’industrie financière avait été condamné à 10 ans de prison pour fraude et évasion fiscale en 1990.

Surnommé le roi des obligations pourries (« junk bonds »), il avait plaidé coupable en 1990 de fraude et d’évasion fiscale, comme le rappelle le quotidien français Les Echos. Il avait toutefois nié les accusations de délit d’initié découlant d’un témoignage d’Ivan Boesky, dont le doux sobriquet était Ivan le Terrible. Ce dernier a inspiré le sulfureux personnage de Gordon Gekko, joué par Michael Douglas dans le célèbre film Wall Street d’Oliver Stone en 1987. 

Malgré une condamnation à 10 ans de prison, M. Milken n’avait toutefois passé que deux ans derrière les barreaux. Il avait au passage payé une amende de 600 millions de dollars américains (792,8 M$ CA). Rien pour le mettre à la rue : sa fortune personnelle est aujourd’hui évaluée à 3,7 milliards de dollars par Forbes. M. Milken reste cependant banni à vie du secteur financier.

DES APPUIS DE TAILLE

Ce n’est pas d’hier que Michael Milken tente d’obtenir la grâce présidentielle. Ses demandes auprès de Bill Clinton et George W. Bush avaient toutefois été rejetées. Il aurait cette fois bénéficié de l’appui actif du secrétaire au Trésor Steven Mnuchin, de l’ex-maire de New York et influent républicain Rudolph Giuliani et de Jared Kushner, le gendre de Donald Trump. Ironiquement, c’est Rudolph Giuliani qui avait fait tomber Michael Milken alors qu’il était procureur. 

La Maison-Blanche a notamment souligné qu’il avait contribué à la « démocratisation de la finance » en permettant aux « femmes et minorités d’avoir accès à des capitaux qui leur étaient indisponibles ». Avec sa banque Drexel Burhnam Lambert, il est à l’origine du marché des obligations pourries. Ces titres hasardeux étaient émis par des sociétés qui n’avaient pas accès au financement bancaire classique et se voyaient boudés par les investisseurs. On parle donc de produits à haut rendement, mais très risqués.

Les Echos rappellent qu’à la fin des années 1970, à peine 6 % des entreprises américaines étaient bien notées par les agences. La réserve d’obligations jugées de moindre qualité était énorme.

VIRAGE PHILANTHROPIQUE

Avec l’apport de M. Milken, les émissions d’obligations pourries seront multipliées par 100 dans les années 1980. Drexel a été le chef de file de ces émissions avec des commissions importantes de 3 à 4 %. Ses courtiers gagnaient aussi de l’argent en spéculant et assurant la liquidité sur le marché secondaire. En situation de quasi-monopole, Drexel fixait les prix et animait le marché à sa guise, racontent Les Echos.

Depuis sa chute, M. Milken s’est consacré à la philanthropie, notamment à la lutte contre le cancer, ce que le président n’a pas manqué de mentionner pour justifier son pardon. Il a aussi rappelé que M. Milken avait été un pionnier de l’industrie financière. Bill Pascrell, élu démocrate du New Jersey à la Chambre des représentant, y voit plutôt « un nouveau scandale d’un président sans foi ni loi ». 

La rédaction