La divergence se poursuit entre le Canada et les États-Unis

Par Nicolas Ritoux | 21 mai 2024 | Dernière mise à jour le 27 mai 2024
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Le pont Ambassador relie Détroit, dans le Michigan, à Windsor, dans l'Ontario. C'est l'une des routes commerciales les plus fréquentées d'Amérique du Nord. Cette photo a été prise depuis Windsor, Ontario, Canada, en regardant vers le nord-ouest en direction de Détroit.
steven kriemadis / iStock

La Banque du Canada (BdC) pourrait être amenée à baisser ses taux avant la Réserve fédérale américaine (Fed), croit Adam Ditkofsky, gestionnaire de portefeuille principal, revenu fixe mondial, Gestion d’actifs CIBC.

« Pendant que les États-Unis poursuivaient leur forte croissance économique, avec une inflation au-dessus des 3 %, le Canada a montré des signes de faiblesse, notamment du côté de la consommation, et nous avons atteint notre cible d’inflation entre 2 et 3 %. Il s’agit là d’inflation globale incluant l’énergie, l’alimentation et le logement, qui ont tous été inflationnistes. Le peu d’amélioration observée dans l’économie canadienne tient à notre politique agressive d’immigration. Le PIB par habitant continue de baisser, ce qui est négatif pour les Canadiens », analyse Adam Ditkofsky.

L’expert s’attend toujours à une baisse de taux aux États-Unis en 2024, mais pour le moment, la Fed est encore retenue par une inflation plus têtue que prévu. L’économie américaine a aussi performé au-delà des prévisions, en partie grâce à ses consommateurs. Leur taux d’épargne par rapport au revenu disponible est passé de 6 à 3 %, et leur contribution au PIB approche les 70 % par rapport à une proportion historique de 67 %. Leurs dettes sur carte de crédit sont 22 % plus importantes qu’avant la pandémie. 

« Au Canada, c’est un tout autre tableau. Nos ventes au détail ont chuté au début de l’année et notre taux d’endettement est proche de la moyenne historique de 6 %. Il semble donc que nos consommateurs aient perdu confiance, et beaucoup croient que c’est à cause de la structure de notre marché hypothécaire, où la plupart des emprunteurs voient leur taux réajusté tous les cinq ans. Dans tous les cas, notre économie est matériellement plus faible », dit Adam Ditkofsky.

L’emploi a un grand rôle à jouer : pendant qu’il dépasse les 6 % chez nous, il reste en deçà des 4 % chez les Américains. Et alors que nous manquons d’emplois, eux n’ont que l’embarras du choix entre de nombreux postes à pourvoir. 

On observe une « importante divergence » entre les deux pays, et le Canada sera donc sûrement plus rapide à baisser son taux directeur, conclut l’expert.

QUELLES CONSÉQUENCES POUR LES PLACEMENTS À REVENU FIXE ?

« Le marché obligataire a déjà reculé cette année, quand les prédictions de baisses de taux se sont trouvées refroidies. N’oublions pas qu’en janvier, le marché des contrats à terme prévoyait de cinq à six baisses de taux au Canada et aux États-Unis à partir du mois de mars. Désormais, le marché ne prévoit qu’une ou deux réductions au Canada cette année, et une seule pour les États-Unis au quatrième trimestre. Ces prévisions se reflètent d’ores et déjà dans les prix », affirme Adam Ditkofsky.

« Les investisseurs devraient profiter des rendements élevés que leur offrent aujourd’hui les obligations, surtout à court terme puisque la courbe de rendement demeure inversée. Il y a notamment de bonnes occasions parmi les fonds à date cible, qui regroupent des titres arrivant tous à échéance la même année. Ceux qui les conservent jusqu’à la maturité profitent du rendement sans se soucier de l’effet des taux d’intérêt sur le marché secondaire. Dans un contexte où les obligations à trois ans du Canada offrent près de 4 % et ceux à un an près de 5 %, si on ajoute à ces fonds des obligations de sociétés de haute qualité, on obtient facilement de 5 à 6 % », poursuit l’expert.

Il reconnaît que du point de vue du risque de crédit, les obligations de sociétés pourraient être affectées si jamais les baisses de taux d’intérêt tardent à venir. Mais on peut réduire son exposition à ce type de risque en optant pour les titres à échéance plus courte. 

Du point de vue géographique, l’expert demeure concentré sur l’Amérique du Nord, mais il conserve des positions un peu partout dans le monde. 

Du côté des secteurs, il apprécie les banques et l’immobilier locatif, mais recommande d’en faire l’analyse ascendante. 

« Pour les banques, cela veut dire vérifier que les marges sur les prêts sont solides, avec des provisions et des niveaux de capitalisation adéquats. Pour l’immobilier, cela implique de sélectionner les loueurs qui génèrent les flux de liquidité les plus robustes, et sont en mesure d’augmenter leurs loyers, avec une préférence pour les résidences pour personnes âgées, les sites industriels, et les centres de données. » 

Ce texte fait partie du programme Gestionnaires en direct, de la CIBC. Il a été rédigé sans apport du commanditaire.

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Nicholas Ritoux

Nicolas Ritoux

Nicolas Ritoux est journaliste indépendant. Il collabore à Conseiller.ca depuis 2009.